Fyctia

Mars 2012…

-Quoi ?

Max reprend sa position. Les coudes posés sur les genoux, les mains liées, mais son regard se dirigeant vers le sol. Comme si c’était lui qui était gêné par cette révélation. Lui plutôt que moi.

-Ecoute Evan…je suis au courant pour Paola. Je sais qu’elle fait du chat mais…pas pour les raisons auxquelles tu penses. Je t’en prie continue, on en parle après si tu veux. Finis d’abord ton histoire.

Je n’arrive plus à bouger, je suis comme statufié sur place. Pourquoi Paola ne m’a rien dit ? Pourquoi a-t-elle parlé de moi sans mon accord ? Je me perds dans mes questions avant d’entendre Max se racler la gorge pour me faire comprendre de poursuivre.

-Pardon…oui je…donc ensuite j’ai fait du chat avec Paola. C’était bizarre la première fois, c’était comme si tout ça devenait plus réel. Plus glauque que ça ne l’était déjà. Je ne faisais plus travailler mon imagination, je regardais et m’inspirais du corps qui bougeait devant moi. Je me laissais guider par mes pulsions sans vraiment pouvoir lutter je…j’avais l’impression d’être un autre. Quelqu’un d’ignoble, vulgaire et dépravé. Je continuais de me détester mais je ne pouvais pas arrêter pour autant.

Je sens une larme dévaler ma joue que je m’empresse d’essuyer avec le dos de ma main avant de reprendre mes cent pas.

-Toutes ces obsessions qui m’habitaient sont montées en puissance au fil des années. Je sortais plus, je ne voyais plus mes amis…

Je le regarde pour qu’il puisse comprendre que je m’en veux réellement de m’être éloigné, mais qu’inconsciemment je n’avais pas le choix.

-…je restais cloitré chez moi et je continuais de laisser mon corps décider, de le laisser vivre à ma place. Et un jour, tout ça ce n’était plus assez pour lui, il voulait encore plus. Il réclamait un contact, un contact physique. C’est comme ça que je me suis retrouvé à m’inscrire dans un Club, un Sex Club. Un endroit où les tabous ne sont pas permis. Un endroit où il n’y a pas de frontière, pas de préférence. On peut tout essayer sans être jugé ou comparé. Et…tu as le choix de ton, ta ou tes partenaires sexuels.

Je vois le regard de Max se poser sur moi mais bizarrement je sens qu’il ne me juge pas. Il m’écoute. Il entend chacun de mes mots.

-Je vais t’épargner les détails de mes rapports au Club. Je vais seulement te dire que j’ai pensé avoir touché le fond à cette époque-là. J’ai cru que je ne pourrais jamais sortir de l’engrenage dans lequel je m’étais fourré. Jusqu’à ce que je revois Anna. Elle avait mûri, elle avait changé mais…sa présence agissait toujours autant sur moi. Physiquement je ne contrôlais rien mais mentalement elle apaisait certaines de mes pensées. Comme si je voyais les choses plus clairement.

Je vois un sourire étirer le coin de sa bouche. Il sait que j’aime sa sœur mais…maintenant il sait comment. A quel point elle compte pour moi.

-Le soir où tu nous as trouvés dans les chiottes du bar on…

-STOP ! Je t’en supplie ne me donne pas de détails !

Je me mords la joue pour éviter de rire car la situation ne s’y prête pas mais…je suis à deux doigts de laisser éclater mon hilarité quant à sa réaction. Je m’efforce de reprendre mon sérieux, je veux que Max comprenne que je n’ai pas fait tout ce que j’ai fait par choix.

-Ta sœur a été très compréhensive dès le début, malgré mes envies à répétitions. Sans compter ma capacité à jouir plusieurs fois de suite. Une malédiction pour un mec comme moi. Mais pour la première fois de ma vie j’ai éprouvé du plaisir, j’ai retrouvé l’envie, le désir. J’avais moins honte de moi, je me sentais devenir un homme avec elle, je n’étais plus cet animal sans cœur qui se contentait de se nourrir.

Je me rassois face à Max parce que la partie qui vient va être la plus difficile à confier. Celle qui fera qu’il fera un choix, un choix entre rester et m’aider ou partir et me laisser. Seul.

-Puis une première fois elle m’a surpris dans la salle de bain dans une position plus que dégradante. Je venais de me branler et j’en avais encore partout sur le ventre et les doigts quand elle est entrée. Je me suis senti mal. Pour elle comme pour moi. Mais malheureusement je ne pouvais rien contrôler. Quand mon corps réclamait d’être soulagé il fallait que je le fasse, je n’avais aucun moyen de lutter contre mes pensées. Et même si j’aime ta sœur je refusais de me servir d’elle pour assouvir mes pulsions.

Je le vois hocher légèrement la tête. Signe qu’il comprend ma façon de raisonner face à tout ça, même si pour le moment il n’a toujours fait aucun commentaire.

-Ensuite j’ai perdu mon travail au Cabinet. Parce que comme un connard je n’arrivais à me retenir non plus au boulot. J’ai commencé par naviguer sur des sites pornos pendant mes pauses. Sauf que je ne savais pas que mes patrons demandaient régulièrement des contrôles de nos activités pour éviter quelconque réputation visant à nous discréditer. J’ai eu un premier avertissement et j’ai arrêté de me connecter depuis mon PC. Mais j’ai continué sur mon téléphone. Jusqu’au jour où mon patron m’a surpris la queue à la main dans mon bureau pendant que je vomissais dans ma poubelle. Il m’a viré dès le lendemain.

Je sais que cette partie-là est importante pour Max. ça correspond à la première fois qu’il est venu me mettre en garde pour Anna. Pour me prévenir que si je merdais il m’en collerait une. Et je ne peux que remarquer qu’il avait raison de croire que je foutrais tout en l’air. Même si je doute qu’il sache de quelle façon.

Mais ce soir il va le savoir.

Est-ce qu’il va l’accepter ?

J'en sais rien, mais je suis pas sûr que sa compréhension soit sans limites.