Fyctia
CHAPITRE 4 : 30 novembre
A l’aube, lorsque mon réveil sonne, je n’ai quasiment pas fermé les yeux de la nuit. La boule qui pèse une tonne dans mon estomac et mes pensées incessantes en sont les deux principales causes. Je me lève et me traine jusqu’à la douche à contrecœur. Je fais rapide et, comme la veille, attache lâchement mes cheveux et me contente de laisser mon maquillage dans ma trousse. Pour seul déjeuner, je ne parviens à avaler qu’un verre de jus d’orange.
Avant de partir, je vérifie une dizaine de fois mes bagages. Chaque fois, c’est pareil. J’ai cette angoisse d’oublier quelque chose qui pourrait se révéler très important et je ne peux m’empêcher de refaire plusieurs fois l’inventaire pour être sûre. Après une énième vérification, je ferme définitivement ma valise et enfile mon manteau. A l’entrée de mon appartement, j’ai comme une hésitation. Depuis le seuil, mon regard fait le tour presque avec nostalgie, comme si je partais pour de bon. Je secoue la tête pour me ressaisir. Quelle sordide pensée !
Je monte dans le premier taxi qui daigne m’accepter. Là, bercée par le ronronnement de la voiture, je sens le sommeil tant attendu venir alourdir mes paupières. J’écrase de la main, le plus discrètement possible, un bâillement. Vivement que le jus fasse son effet avant que je ne m’endorme ! J’essaie de rester éveillée en suivant du regard les passants pressés mais, très rapidement, leur agitation me rappelle ma fatigue et je laisse tomber. Je reporte alors mon attention sur mon téléphone. Je ne suis pas une grande utilisatrice des réseaux sociaux mais, cette fois-ci, je compte bien là-dessus pour éviter de m’endormir. Mais, c’est sans compter tous ces posts à propos de Noël qui réveillent et renforcent un peu plus mon anxiété. J’en deviens nauséeuse. Je déglutis et souffle lentement.
Nous finissons par arriver à l’aéroport. Je remercie le chauffeur et lui donne un pourboire avant de m’extraire de l’auto. Je reste un instant immobile, les yeux levés vers le bâtiment moderne, pensive. Je divague et repense à toutes ces fois où nous avons pris l’avion en duo ou en famille pour des voyages de Noël…
Je chasse ces pensées et m’exhorte à entrer alors que tout le monde sur le trottoir ne se gêne pas pour me bousculer. Je repère mon comptoir d’enregistrement. C’est une hôtesse désabusée qui m’accueille d’un regard mauvais. Je ne laisse pas transparaître mon agacement et lui tends mes papiers. Je dépose ma valise sur le tapis roulant qui ne met pas longtemps pour la faire disparaître et garde mon gros sac avec moi. Elle me donne ma carte d’embarquement et passe, sans un au revoir, au client suivant.
Après le contrôle de sécurité et la longue attente de deux heures, je monte enfin dans l’avion et trouve ma place rapidement. L’entreprise a eut le bon goût de me mettre en première classe. Encore heureux. Ils peuvent au moins faire ça alors qu’ils m’envoient droit en Enfer ! Je me love confortablement dans mon siège contre le hublot, met mon casque sur mes oreilles pour que la musique couvre les potentiels bruits de conversation ou d’enfants qui dérangeraient ma tranquillité et attends le décollage. Ce que je préfère quand je prends l’avion, c’est cette vue, la possibilité de contempler cette étendue bleue, ces nuages mousseux… Je suis donc ravie d’avoir une place contre le hublot, d’autant plus qu’au moins je ne serais pas dérangé par les passages des autres usagers.
Dès que nous sommes dans les airs, je ne mets pas longtemps à fermer les yeux. Malgré l’état d’angoisse dans lequel je suis, je tombe dans les limbes du sommeil, trop fatiguée pour que quoique ce soit m’en empêche.
Lorsque je me réveille, j’ai l’impression d’avoir dormi deux secondes, mon sommeil peuplé de cauchemars. Pourtant, j’entends la voix du pilote dans les haut-parleurs annonçant l’atterrissage imminent. J’ai beau ne pas être reposée, l’avantage étant que le voyage a été rapide. Bien que ce ne soit pas terminé puisqu’il faut que je prenne le bus jusqu’au village puis il faudra que je trouve le gîte. A la descente, je me dépêche donc de récupérer ma valise et court vers la parking où un endroit est réservé aux bus et monte dans le mien, essoufflée.
Trente longues minutes sur des routes cahoteuses m’attendent désormais. Le chauffeur se met en route peu de temps après ma montée. Cette fois-ci, pleinement éveillée, la tension monte d’un cran alors que mes yeux fixent le paysage par la fenêtre. Peu à peu, le soleil semble disparaître de plus en plus derrière les nuages, le ciel paraît s’assombrir et l’herbe verte devient couche blanche de neige. J’hallucine. Nous ne sommes pas si loin que ça de New-York et, pour autant, je me sens totalement dépaysée. Je baisse les yeux sur mes Converses réalisant l’étendue de mon erreur. Je grimace. Voilà. Ça y est. On y est. Ça commence.
Je pince l’arrête du nez pour réfréner le mal de tête qui commence déjà à poindre et pour garder mon calme. Je me mets déjà dans tous mes états pour de simples pieds mouillés alors que nous ne sommes même pas encore arrivés ! Je souffle longuement et me concentre sur la route qui devient de plus en plus sinueuse. Malgré l’étroitesse, le conducteur semble à l’aise, ce qui ne me rassure tout de même pas.
Lorsque nous arrivons enfin, je vois le soulagement de ma voisine sur son visage. Il est vrai que je n’ai pas dû être le meilleur compagnon de voyage. J’ai eu du mal à tenir en place, soit ma jambe tremblotait, soit je pianotais sur mon accoudoir. Tout ce qu’il peut y avoir d’irritant pour quelqu’un d’autre tandis que cela soulageait un tant soit peu mon stress. Nous descendons à la file indienne. Dès que je saute hors du bus, le froid mord immédiatement mes pieds et mes mollets. Je pince les lèvres et avance jusqu’à la soute pour récupérer mes affaires. Non seulement je suis déjà gelée au bout de quelques minutes mais, en plus, je réalise qu’il va falloir que je porte ma valise puisqu’elle ne roulera pas avec cette masse de neige.
A peine arrivée, déjà de mauvaise humeur. A peine arrivée, déjà envie de repartir. Je réprime un gémissement plaintif et sors mon téléphone pour lancer mon GPS. Impossible d'avoir mon itinéraire. Je peste pendant cinq minutes contre l'application avant de remarquer que je n'ai pas de réseau. Bien évidemment, je n'avais pas pensé à cette éventualité et je n'ai donc pas pris de carte ! Je commence à marcher en ignorant quelle direction prendre, ayant pour seule envie d'envoyer paître qui que ce soit qui oserait venir m'adresser la parole.
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AlphyM
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Il y a 4 ans
Océane Ginot
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Il y a 4 ans
Line Manoury
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Il y a 4 ans
Océane Ginot
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tyson
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Loumina
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Il y a 4 ans