Fyctia
Chapitre 25 : Ethan (2/2)
Je m’immobilise, mes muscles se raidissent à nouveau. Vu le volume de sa voix, je remercie le ciel que le Starbucks soit désert.
— Tu m’as repoussée, t’as repoussé tout le monde. Y avait plus rien pour moi là-bas, je te rappelle ce que je subissais à l’école ? Je pouvais juste… je pouvais pas affronter ça sans toi. Donc je suis partie, mais c’est pas toi que j’ai laissé tomber.
Ma gorge se noue. Se pourrait-il que mon cerveau dérangé ait refait l’histoire ? Je ne me souviens pas l’avoir laissée seule. L’ai-je fait ? La boule dans ma gorge s’épaissit au souvenir de cette période, je ne voulais plus penser à mon père et j’ai peut-être repoussé les gens qui me le rappelaient d’une manière ou d’une autre. L’ai-je vraiment laissée seule ? Des images de mon père me reviennent en tête, mais je ne les laisse pas affluer et redresse la tête afin de ne pas laisser couler les larmes qui menacent de poindre. Je n’ai pas pleuré depuis sept ans. Je ne recommencerai pas aujourd’hui.
Sans me retourner, je gagne la sortie et cette fois, Lucy ne me retient pas. Je dois appeler Lou. Je dois me concentrer sur autre chose que le visage ensanglanté de mon père dans la salle de bain. Je dois focaliser mon attention sur autre chose que le sachet de poudre blanche planqué dans le tiroir de ma table de nuit. Je clique sur le contact de Lou, mais au bout de quelques sonneries, je tombe sur sa messagerie. J’essaye de la rappeler, mais elle ne décroche toujours pas. Je lui envoie alors quelques messages.
Je ne reçois aucune réponse de la journée et entre le mutisme de Lou et ma conversation avec Lucy qui me travaille, j’ai offert une performance ridicule durant l’entraînement de basket de l’après-midi. Sa présence au séminaire de Causes et manifestations du phénomène criminel n’a pas pu me rassurer, car il a été annulé. Mes colocataires ont passé la fin de matinée à me dire que j’étais dans la lune et le reste de mes coéquipiers à m’interroger l’après-midi. Graham a essayé de se retrouver seul avec moi à plusieurs reprises, mais je me suis dérobé à chaque fois. Il reste donc à m’observer à distance.
Aux alentours de 19 h, peu après mon retour à la colocation, je sens mon téléphone vibrer et pour la trentième fois de la journée, je me jette dessus en espérant que la notification vienne de Lou. Je soupire de soulagement, lorsque cette fois, son nom s’affiche sur l’écran.
J’adresse un sourire niais à mon téléphone et secoue la tête. J’ignore avec soin les regards interrogateurs de mes colocataires tandis que nous sommes tous réunis dans le salon.
Je pouffe de rire devant l’écran.
— C’est qui ? m’interroge Mathis.
Lorsque je relève la tête, leurs quatre paires d’yeux sont braquées sur moi.
— Ela, répondis-je sans hésiter. Elle est vraiment conne.
Je lis la suspicion sur le visage de Graham, mais les autres acceptent la réponse et se marrent sans oublier de me ramener à l’enjeu du pari.
Soit elle ne va pas si mal, soit elle a vraiment besoin de se changer les idées.
À 21 h 00, nous rejoignons quelques-uns de nos coéquipiers au bar. Je suis beaucoup moins perdu dans mes pensées depuis qu’un de mes problèmes a été réglé et malgré moi, un sourire se dessine sur mon visage lorsque j’aperçois Lou en passant la porte. Elle m’adresse un signe de tête et un clin d’œil avant de focaliser son attention sur Michael. Elle est installée à l’opposé de la blonde qui lui a piqué son mec. Un instant, je suis surpris de ne pas voir Lucy, mais je me rappelle que Thanksgiving a lieu dans deux jours et qu’elle a sans doute rejoint sa famille. Elle. D’autres étudiants la rejoindront demain. D’autres, comme moi, resteront ici durant l’entièreté du week-end. Ma mère bosse.
Au cours de la soirée, nous nous adressons des regards fréquents. Je prends le temps de vérifier, à distance, qu’elle ne boit pas une bière ou une autre boisson alcoolisée, mais sa bouteille de coca trône à côté de son verre. Lors d’une œillade, je lui fais signe de me rejoindre dehors et me lève pour aller vapoter à l’extérieur. Je vérifie d’un coup d’œil qu’elle me suit avant de passer la porte et souris lorsque je la vois se redresser à son tour. J’ai le temps d’une clope pour la convaincre de se ramener chez moi ce soir, avec les autres. J’ai deux raisons de le faire : la première, ça lui changera les idées. La deuxième est bien moins noble : ça apaisera mes potes qui me demandent des nouvelles du pari en permanence. Si je dois me servir d’un « action », tant pis. Elle sera là.
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clecle
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Jill Cara
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Il y a 9 mois
Marie Andree
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Marion_B
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nat59495
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Louise B.
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Debbie Chapiro
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Louise B.
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Rose Leucate
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Il y a 9 mois