Elma Hilde 7 : le jeu de tous les péchés Retrouvailles 1/3

Retrouvailles 1/3

Le froid cinglant d'octobre sévit sur cette belle ville de Seattle. Le vent s'engouffre bruyamment entre les hauts immeubles atypiques, cachant bon nombre d'entreprises, de banques, de restaurants ou de boutiques en tous genres. Cela fait deux jours que j'ai emménagé dans mon nouvel appartement, qui se situe à quelques rues d'ici et je n'ai assisté qu'à une succession d'averses. Heureusement, ce matin, je bénéficie d'une petite accalmie, ce qui me permet de me rendre au travail à pied. Le climat tropical de la Floride me manque déjà. J'ai dû repenser l’intégralité de ma garde-robe. Je relève le col de mon trench de couleur crème avant d'enfoncer les mains dans mes poches, espérant ainsi me réchauffer quelque peu. Finalement, il me faut moins d'un quart d'heure de marche pour arriver au siège des éditions Bailey.

C'est parfait !


Aujourd'hui, j'entre dans la vie active. Je viens d'être embauchée comme directrice éditoriale pour une nouvelle collection. Ils veulent se diversifier et ont décidé de me confier la lourde tâche de faire naître ce nouveau projet. Je suis très stressée, car je n'ai comme expérience professionnelle que mes quelques semaines de stage au sein de cette même maison, il y a quatre ans de cela. L'enjeu est énorme pour eux, comme pour moi.


Arrivée à l'angle de la rue, je découvre le grand bâtiment, haut de neuf étages. Cette vieille bâtisse, qui m’est si familière, est en pierre blanche dans laquelle ont été taillées de jolies moulures. Elle est dotée d'une centaine de vitres pour habiller la façade. Je me redresse fièrement avant de franchir les portes battantes de leurs locaux. Le hall d'entrée occupe tout le rez-de-chaussée. Juste en face de moi se trouve le bureau d'accueil. Une enseigne en inox est fixée au mur derrière le comptoir. À ma gauche est disposé un grand salon composé de canapés en cuir noir et de tables basses de la même couleur. Sur le mur du fond sont accrochés des dizaines d’affiches représentant les plus grands succès d'édition de Bailey. L'endroit est déjà bondé d'employés qui convergent vers leurs lieux de travail. J’avance jusqu’à l’hôtesse en poste l'accueil.


― Bonjour, dis-je poliment.


La jolie blonde lève ses grands yeux verts vers moi. Son élégance m’interpelle de suite. Elle porte un très joli tailleur beige. Son chignon bas, parfaitement réalisé, lui donne énormément de classe.


― Bonjour mademoiselle.


― J'ai rendez-vous avec monsieur Bailey.


―Oui, quel est votre nom?


― Ava Payne.


Elle effectue quelques vérifications sur son ordinateur.


― Effectivement. J'ai votre badge mademoiselle Payne.


Elle cherche dans un tiroir avant de me tendre une carte blanche.


― Merci.


― Bienvenue aux éditions Bailey.


― C'est gentil. Merci beaucoup.


― Le bureau de la direction se trouve au huitième étage. Celui de monsieur Bailey sera sur votre gauche. Adressez-vous à sa secrétaire.


―Entendu. Merci et bonne journée.


― À vous aussi mademoiselle Payne.


Je lui souris chaleureusement avant de me faufiler jusqu'aux trois ascenseurs qui se trouvent à droite du salon. J’entre dans le premier qui arrive. Deux hommes en costumes se joignent à moi. Nous nous saluons poliment. Ils descendent trois étages plus haut. L'ascenseur continue sa montée et, en quelques secondes, j'arrive dans les bureaux de la direction. Je sors et me dirige vers la gauche. Je passe nerveusement une main sur ma jupe noire pour m'assurer qu'elle soit parfaitement lisse quand je bouscule quelqu'un sur mon passage.


― Oh ! Pardon ! M'excusé-je, en levant les yeux vers la personne, que je viens de heurter.


Super ! Ma journée avait pourtant bien commencé.


― Bonjour, me dit l'homme planté en face de moi.


Ses yeux noirs me scrutent sans aucune retenue.


Bah voyons ! Fais-toi plaisir surtout.


― Bonjour, dis-je fermement, en croisant les bras sur ma poitrine.


Je me mets alors, moi aussi, à l’examiner de haut en bas. Il porte un élégant costume trois-pièces gris et une cravate à carreaux bleue qui doivent valoir les yeux de la tête. Ses cheveux noirs sont parfaitement coiffés en arrière. Ses lèvres charnues illuminent son beau visage d'un sourire charmeur, ce qui fait apparaître deux sublimes fossettes au creux de ses joues. Mais ce n'est rien en comparaison à son regard ébène. Je me plonge dans ses deux abysses à en perdre mon âme.


― Je peux vous aider ?


Le son puissant et grave de sa voix me fait revenir à la réalité. Et ma colère reprend vite le pas sur ma contemplation.


― Sérieusement ?!


Il ne me reconnaît même pas ce crétin ! Ugly Betty, ça te dit quelque chose...


Mon ton hautain et insolent le décontenance subitement


― Vous êtes perdue ?


Il me parle avec une certaine prudence.


― Je ne suis pas perdue ! Je sais parfaitement où je vais Théodore et tu es toujours le même imbécile ignorant, si je peux me permettre !


Je passe devant cet ignare à la mine défaite et reprends ma route. Je suis là depuis deux minutes et il me met déjà hors de moi.


Ressaisis-toi Ava, tu auras tout le loisir de lui faire regretter ses paroles plus tard.


Pour l’instant, je suis attendue et je ne veux pas être en retard à mon rendez-vous.


― Bonjour, je suis mademoiselle Payne. J'ai rendez-vous avec monsieur Bailey, informé-je la secrétaire.


― Il vous attend. Allez-y, mademoiselle Payne.


J'ouvre la porte et entre. L’endroit est très différent de la dernière fois où je suis venue. Un bureau au design moderne fait de bois et de cuir trône au milieu de la pièce. Des meubles de rangements longent le mur de droite, alors qu'un salon de cuir noir est disposé sur le pan gauche. Mon père, un homme d'une cinquantaine d'années, à l'allure svelte et sportive, se tient assis sur l’un des canapés. Le bruit de la porte le sort de sa lecture. Il regarde dans ma direction.


― Ma princesse, je t'attendais.


― Bonjour papa.


Je parcours la distance entre nous avant de me blottir dans ses bras.


― Je suis content de te voir.


― Moi aussi.


― Assieds-toi m'invite-t-il.


Je prends place à ses côtés et l'observe soucieusement. Il a les traits tirés et semble être très fatigué. Malgré tout, il reste très bel homme avec son regard bleu profond et énigmatique. Même ses cheveux grisonnants lui donnent de l’allure. Et son sourire séducteur lui a valu bien des ennuis. D'après ma mère, sa forte personnalité et sa beauté brute lui apportaient un succès fou auprès de la gente féminine et c'est, entre autres choses, ce qui lui a coûté son mariage. Bien sûr, ils m'ont épargné les détails de leur séparation. La version officielle étant que le travail de mon père et ses absences à répétition les ont éloignés l'un de l'autre.

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1 commentaire

MathChabb

-

Il y a 6 ans

Ce début me plaît
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