Sandra MALMERA 24 jours, un chocolat 17. Seconde case 1/4

17. Seconde case 1/4

  • Samedi 02 décembreASHLEY

Mais quel con ! J’ai vraiment hurlé ? Je crois bien. En fait, j’en suis sûr, vu le regard curieux que me lance Cassie alors qu’elle se redresse et essaie tant bien que mal de reprendre une respiration normale. Elle penche la tête, fronce son nez tel un appel à y déposer mon doigt pour appuyer dessus. Et elle finit par se plier en deux, à rire, à gorge déployée. D’accord… là, je ne comprends vraiment plus rien.


— Rodolf ? C’est tout ce que tu as trouvé pour m’éloigner ?


Quoi ? Non ! C’était plutôt comme un éclair de lucidité dans le brouillard qui occupe ma tête. La soirée d’hier est encore floue, je me souviens de mon arrivée, notre baiser, sa fuite et après la colère. Un orage de rage qui a grandi quand son index s’est levé contre mon torse pour m’éloigner d’elle. Je grogne perdu face à l’image du visage triste de Stella, avant de prendre conscience qu’elle est à présent devant moi, les mains sur ses genoux à m’observer d’un œil attentif. Patiente, une douce chaleur émanant du sourire qu’elle m’adresse.


— Alors Crève-cœur, tu voulais dire quoi en criant comme ça ? me demande-t-elle tandis que je reste silencieux.


Je hausse les sourcils, me frotte la nuque et avise un mouvement vers mes cheveux mais ses doigts stoppent mon geste. Elle empoigne ma paume, l’éloigne de ma tignasse et entremêle sans s’en rendre compte ses doigts aux miens. Surpris, je fixe nos mains. La sienne est douce, gracieuse avec quelques tâches de… peinture ? Alors que la mienne semble immense, trop imposante et forte. Pourtant, alors que je remonte mon attention vers son poignet, je ne peux que comprendre le message.


— Tu es toujours restée mon étoile, soufflé-je en me détachant d’elle pour tracer les contours du dessin à l’encre noir qui prolifère au creux de son articulation.

Des traits sombres que je reconnaitrais entre tous. Un enchevêtrement de courbes, d’étoiles et surtout d’une, si particulière qu’elle en devient unique. Ce dessin, c’est le mien. Celui de notre promesse silencieuse d’être là, l’un pour l’autre. Mais mon monde de lumière s’est terni quand j’ai laissé filer cette étoile. Merde, Ash ! Pourquoi faut-il toujours que je passe d’une émotion à une autre en un instant ?


— C’est le même.

— Non. Ce n’est pas le même. C’est lui. En fait… j’en avais fait des croquis, puis je l’avais calqué à partir de ma peau pour n’en manquer aucun détail. Ensuite, je l’ai gardé précieusement pendant un temps. Et un soir sur un coup de tête, je me suis décidée. Au fond, je suis encore cette adolescente rêveuse que tu as connue.

— Je…

— Ce n’est pas la peine. Bon ! amorce Cassie comme pour clore cette discussion gênante et douloureuse pour nous deux. Tu demandais après Rodolf ?


Je n’ai ni le temps de réagir ni celui de dire quoi que ce soit que déjà elle saute de sa chaise, et se précipite vers le salon. Mais elle a beau fuir, je les ai vues, ses pommettes roses. Sur lesquelles je me ferais un plaisir de déposer des baisers avant de reprendre possession de ses lèvres. Comme hier ? Non ! Ce ne serait pas suffisant, maintenant que j’y ai goûté, j’en veux plus. Et puis, n’est-ce pas là mon objectif ? La faire craquer et tomber dans mes bras d’ici le vingt-quatre décembre ?

D’ailleurs, en la voyant courir jusqu’à la table de chevet en bois qui leur sert de bout de canapé, je ne peux que me délecter de ses formes. Ses fesses rebondies cachées par ce short et ses infâmes oursons me donnent chaud. Ma main vient instinctivement tirer sur mes mèches alors que mon corps, lui, réagit d’une toute autre manière. Excité à l’idée de peut-être pouvoir à nouveau sentir le parfum sucré de Stella contre lui. Ressentir chaque parcelle de son épiderme, chacun des frissons qui la gagnent quand on trace un trait avec sa langue allant de sa cicatrice derrière l’oreille à la base de son cou.

Merde ! Pas maintenant !

Je me dandine sur mon tabouret, mon pantalon de la veille devenant tout à coup trop étroit. Certain que la situation n’est pas idéale pour avoir ce genre de sensation, je n’arrive pas pour autant à arrêter mes pensées maintenant qu’elles sont lancées. Surtout que Stella semble se jouer de moi, malgré elle. Car au lieu de se contenter de s’accroupir pour attraper l’objet de sa recherche, elle se penche en avant. Son cul pointé vers moi, et son dos dessinant une courbe délicate, délectable.

Je suis foutu ! Dingue même, et pourtant je me lance mes idées embrouillées, se cognant les unes aux autres comme des auto-tamponneuses. Le bourdonnement de mes oreilles toujours en fond, mes jambes me portent vers elle. Les douleurs de ma nuit me ralentissent et alors que j’arrive à proximité de Stella, elle se redresse et se retourne dans un même mouvement. Mes bras en profitent pour se refermer autour de sa taille et coller son corps au mien.

Son souffle se coupe. Ma respiration s’accélère, je suis perdu, loin du présent.


« Ashley… Qu’est-ce que tu fais ? On ne va plus à la soirée ? me demande Stella d’un air innocent alors que je la serre dans mes bras comme pour me raccrocher à mon ancre. Ashley, dis-moi.

Son soupire me rassure. J’aimerais pouvoir lui dire ces mots qui se bloquent dans ma gorge, ceux qui me prennent aux tripes et que j’ai envie de hurler au monde, mais la peur m’engloutit. Cette peur de la plonger dans mon monde. Pourtant mon cœur bat plus fort quand je suis près d’elle, ma tête se vide pour se remplir des images de son sourire et mon âme s’imprègne de toute la lumière qu’elle peut m’offrir.

Alors ce soir, à l’heure où grondent les éclairs et le tonnerre autour de moi, je ne veux qu’une chose : ses bras autour de mon cou, sa bouche sur la mienne et surtout sentir qu’elle est là. Mon étoile. Une étincelle dans un univers où les apparences sont maîtresses de mon quotidien. Une lueur, une flamme même qui pourrait un jour peut-être brûler les fils de la marionnette que je suis. Alors… pour toute réponse, pour que Stella soit consciente du danger qui la guette en restant à mes côtés, je ne peux que lui souffler un nom.


— Jeanne.

— Qu’a-t-elle fait cette fois ? Pourrir ton enfance ne lui a donc pas suffi…


Non… Jamais, elle ne sera satisfaite. Son rêve était d’avoir une fille, mais elle m’a eu, moi. Un vulgaire déchet, un garçon pourvu d’une bite. Un mâle dont elle a si honte que de sa naissance à ses trois ans, elle n’a eu de cesse de l’habiller en jolie petite fille. Une poupée parfaite, jusqu’à ce qu’elle entre à l’école et ne puisse plus faire illusion. Ashley. Le prénom adéquat quand sa mère ne veut pas croire à la réalité. Je grogne, resserre mon étreinte autour de la taille de Stella. Plonge mon nez dans ses boucles brunes pour en savourer toutes les senteurs. Avant de supplier dans un murmure :

— Aide-moi à l’oublier. Ce soir, je ne veux que toi.

— Ashley…


Mon prénom, encore est toujours lui. Mais entre ses lèvres, il prend un autre sens. Il me paraît plus doux, sensuel. Empli d’un désir que nous partageons tous les deux.

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