Sandra MALMERA 24 jours, un chocolat 15. La chute 4/5

15. La chute 4/5

Dans un soupir, je cherche mes amis avant de m’encourager mentalement. Cette soirée est aussi pour toi, Cass. L’occasion parfaite pour découvrir mon œuvre prendre vie. Alors après un dernier coup d’œil vers Rodolf qui est en sécurité, je me décide à faire signe à mes amis et d’un pas confiant, je suis les mouvements amorcés par Éric quelques instants plus tôt.

Eliott est le premier à me rattraper, il ne dit rien, glisse son bras autour de ma taille et m’accompagne vers le son des basses. Frôlant la fresque, je ne résiste pas à laisser mes doigts glisser sur le mur frais quand nous nous enfonçons dans la noirceur. D’un rire presque muet, j’observe les couleurs vertes et vives se transformer, muter pour s’éclairer au fur et à mesure de notre descente. Elles deviennent au fil des pas plus lumineuses, phosphorescentes et précises.

Le monstre perd ses écailles qui nous guident vers la porte d’un Nouveau Monde. Et les arabesques de lucioles qui s’y entremêlent ne rendent le décor que plus vivant.


— Sacré boulot, souffle El à mon oreille. Je me demande vraiment comment l’artiste peut réussir à s’amuser à joueur ainsi avec nous. Mais toi, tu le sais, non ?

— El… Arrête, tu veux. Ce n’est pas parce que tu es dans la confidence que tu dois me charrier.

— Admettons. Mais un jour, il va falloir que tu craches la vérité à tout le monde. Cole, moi, ça ne suffit pas. Le monde entier mérite d’observer ton travail, ton VRAI talent.


J’acquiesce. Nous n’avons pas besoin d’échanger plus de mots pour savoir que cette conversation n’est pas terminée, mais ce n’est pas le lieu ni le moment. Surtout que nous venons de pousser les battants de la porte au bout du couloir et nous prenons une vague de chaleur, musique et lumière presque étouffante. Et euphorisante. Il y a une telle effervescence ici, que je ne remarque même pas le vigile à l’entrée, ni même la jeune fille qui s’occupe du vestiaire, trop subjuguée par la foule, et surtout par…

Merde alors ! C’est moi qui ai peint ça ? J’écarquille les yeux, cligne des paupières trois fois avant de vraiment croire à ce que je vois. Le rendu est encore mieux que dans mes souvenirs. Non pas que je me vante, au contraire, je suis surprise. Je ne m’attendais pas à un tel résultat. Quand j’avais effectué les tests de rendus, il n’y avait aucun spot, aucun stroboscope, ni même une seule personne. Et maintenant ? C’est envoûtant !

Tout prend vie, des plus petits détails des algues, aux effets des reflets de l’eau qui dessinent des courbes et serpentent sur chaque mur, chaque colonne. Le tout agrémenté de mille et une espèces de poissons, de la flore aquatique et de quelques animaux fantastiques cachés ici et là. Et ça ne s’arrête pas là !

Parce que ce serait trop simple et que j’adore jouer sur la double nuance, les mondes parallèles, les univers à double sens. Alors c’est avec des étincelles dans les yeux que j’admire les effets, les mouvements des spots tantôt bleu, vert, rouge ou jaune. Des couleurs qui font se révéler aux spectateurs des histoires uniques les unes par rapport aux autres. Passant de la sirène à ce lézard géant dont le lieu porte le nom.

Puis, viennent s’ajouter à ses changements les passages de la lumière blanche à la lumière noire. D’ailleurs, il me semble percevoir des « oh ! » surpris quand Eliott me pousse à travers la foule pour rejoindre une table libre dans le coin VIP. Privilège de connaître Ash et ses amis. Moi ? Je suis juste heureuse de voir que tout fonctionne comme je l’avais prévu. Et un nouvel éclair ne fait que confirmer mes choix.

Nous envoyant l’image d’un décor tout en couleurs, camaïeu de vert, de bleu et mélange chaud pour les êtres qui prolifèrent sur les murs de pierres avant de nous replonger dans cette ambiance de reflets, ce monde d’écailles, de luminescence et de transparence. Métamorphosant littéralement les scènes qui nous entourent. La sirène n’est plus seule, sa main tendue vers la surface et ses doigts entrelacés à ceux d’un homme dont on distingue la silhouette. Et le monstre ? Lui, il devient doux, presque éphémère, entouré d’un nuage d’étoiles étincelantes.


— Tu t’es surpassée, sœurette. Rappelle-moi pourquoi on ne vient jamais ici ?


J’allais répondre à Cole, à présent détendu, mais nous sommes pris de court par une serveuse qui se ramène avec un plateau plein. Saut à glaçons, verres, bouteilles : la totale ! Et en entendant la voix qui la remercie, je devine le coupable de cette effervescence. Mais merde ! À quoi il joue maintenant ? Mes mains se posent sur mes hanches, mes yeux le foudroient, mais ça n’a aucun effet. Loin de le perturber, ça l’amuse même.


— Un problème, Stella ? Il me semble que c’est MA table.

— Un point pour lui, désolée chérie ! hurle Sandy en riant.

— Ouais, ma jolie ! Je gagne la partie à tous les coups ! Un verre ? Oh non, non ! Toi, tu n’y as pas le droit petite étoile. Et vous ? Hop ! Pardon, Monsieur le Poing ? Un verre ? Nope ? Tant pis, ça en fait plus pour moi. Et un cul sec, un ! Moi, j’y retourne. J’allais oublier, un autre verre pour la route.


J’observe la scène horrifiée, mais n’ose pas faire la moindre remarque. Personne d’ailleurs n’a le

temps d’argumenter que déjà, Ashley détale sa boisson à la main. Purée… Il ne va pas commencer ? Et biens si, en fait, et je ne suis pas au bout de mes surprises. D’autant plus qu’Éric comme Vince semblent abandonner la partie deux heures plus tard. Pourquoi ? Surement parce que notre cher Crève-cœur a commandé une seconde bouteille, s’amuse à demander des titres au DJ derrière les platines, et qu’il colle son corps dans des gestes sensuels contre chaque pouffe qui le veut.

J’enrage. Cette soirée avait pourtant bien démarré si on oublie la collante et pulpeuse, Anna. Et tu as tout gâché en prenant la fuite, Cass. Alors je ne peux m’en prendre qu’à moi. Sauf que… assise là, à analyser les détails de ses mouvements, de ses bras qu’il laisse en l’air se contentant de frôler le corps d’une énième danseuse trop envahissante, mon cœur saigne. Mon corps se languit de la présence d’Ashley à mes côtes et mon âme, elle me hurle de le rejoindre. Alors je résiste. Sais qu’il est bourré, inconscient que sa limite est dépassée depuis plus d’une demi-heure.

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