Lou.R.Delmond ? #Damourunehistoire : 2

#Damourunehistoire : 2

#Damourunehistoire : 2

" A la compagne de voyage, dont les yeux, charmant paysage, font paraître court le chemin... "


Je me lève, manquant de vous touchez. Mais je ne le fais pas, et vous passez à côté de moi en me jetant à peine un regard. Vous aurez oublié jusqu'à mon visage dans quelques minutes. C'est normal. J'aurais peut-être oublié le votre aussi. Même s'il restera sans aucun doute un éclat dans ma mémoire, qui ressortira au moment voulu.


Je me glisse souplement, nonchalamment, parmi vous. Dans toute la discrétion d'une personne qui flâne parmi les autres. Mais l'air de rien, muni du pass que l'on m'a confié, je sors par '' l'entrée des artistes '', réservée au personnel du musée.


Je reste devant la porte, à vous regarder un peu plus loin faire la queue pour entrer. Je suis caché dans l'ombre. J'allume une cigarette.

J'ai été démasqué.

Cette sensation est plaisante.


Ou alors était-ce à cause du charisme de l'homme ? Il y a de la beauté chez lui.

Je vous vois déjà rire. Un homme qui rend hommage aux femmes et qui trouve un homme beau. L'un n'empêche pas l'autre.

C'est le principe du métier de photographe.

Mais je pense que je ne vous apprends rien.


-Il vous en reste une ?

La voix rauque me fait sursauter, en même temps qu'elle me tire un frisson le long de la colonne vertébrale. J'esquisse un sourire pour cacher ma surprise.


Je vous autorise à rire, je suis d'accord avec vous, il est beau, le photographe observateur, alors qu'il se fait surprendre.


Je sors mon paquet de ma sacoche, grâce à la main que j'ai de libre, et le lui tend.

Il l'attrape, et nos doigts s'effleurent, échangeant un peu de chaleur dans l'air frais.

Il tire une cigarette, l'allume avec agilité et me rend le paquet.

Je mets quelques secondes à réagir, perturbé.

Je finis par le remettre dans mon sac.

Il m'observe toujours de ses yeux pâles, un sourire au coin des lèvres, légèrement amusé. Il a une lueur joyeuse, presque joueuse dans le regard.

-Vous n'êtes pas resté dans l'exposition ?

-J'aurais l'occasion de la revoir. Vous êtes plus intéressant que vos photos.

Je souris, lâchant un soupir amusé.

-C'est la première fois qu'on me dit ça.

-Je ne suis pas on.

Je reste pensif. Il a raison. Et j'ai fait une erreur, alors que j'ai l'habitude de cerner les individualités et les mettre en valeur. Mais son expression n'a pas changé. Il est toujours aussi agréable.

La question sort sans que je ne puisse l'arrêter. Il faut vraiment que j'apprenne à me tenir. Mais ce n'est pas important pour vous. Vous passez à quelques mètres, faisant la queue, ou séparé de nous par des murs, et vous ne vous posez pas de questions. C'est bien. Oubliez-tout. Détendez-vous.


-Est-ce que je peux vous prendre en photo ?

-Si vous voulez.

Sa nonchalance me fait sourire. Il tire une nouvelle fois sur sa cigarette, pendant que je sors mon vieil appareil à pellicule. J'ai toujours trouvé que les images étaient différentes au numérique.

Il sourit, appréciateur, en voyant l'appareil photo.

-Il est magnifique.

-Un peu capricieux, mais je suis d'accord, dis-je avec concentration, presque absent.

Je l'entends rire, et je choisis ce moment pour prendre la photo. J'ai la sensation qu'elle va être aussi belle que cet homme l'est à cet instant.


Ca vous intéresserait de savoir si elle figurera dans une prochaine exposition, n'est-ce pas ?

J'aimerais sincèrement vous répondre.

Mais je ne sais pas.


Ses yeux verts brillent d'un nouvel éclat, une rangée de dents blanches est dévoilée, et quel beau son. Une mélodie à la fois claire et chaude, dans les graves et douce.

Lorsqu'il cesse de rire, son regard se plante dans le mien et il sourit. Il prend une dernière bouffée de fumée, qu'il recrache avec une élégance naturelle. Il l'écrase sur le bord en métal de la poubelle, et la jette.


Singulier personnage. Vous gagnerez à le rencontrer, je pense. Comme je sens que je vais gagner quelque chose avec cette rencontre.


Il se penche vers moi, et lorsque son visage est à quelques centimètres du mien, dans l'ombre, et que personne d'entre vous ne peut plus nous voir, il murmure :

-A bientôt, Alexandre.

Puis il disparaît.


Je pense que jamais vous n'avez vu personne s'évaporer si vite.

Je m'adosse contre le mur, les poumons vidés.

Il me drague ?

Pour un parfait inconnu, son attitude est ambiguë.

Mais elle ne me dérange pas.


Je remarque alors un nouveau détail, qui n'en est pas un. Un nouveau papier, posé en équilibre sur la poubelle, que j'attrape avant qu'il ne s'envole ou ne tombe dedans.

Et je souris en voyant les mots. La même écriture.


" Qu'on est seul peut-être à comprendre, et qu'on laisse pourtant descendre... "

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